P. Cacciali : Questions préliminaires aux avancées génétiques

  Chercher le gène

 

On n'a pas retrouvé le gène défectueux pourtant identifié dans une famille écossaise. Pour les troubles plus fréquents, comme le déficit d’attention avec hyperactivité (TDAH), les études initiales dans les années 1990 avaient apporté des résultats très encourageants, mais qui n’ont pas été confirmés. Actuellement, le développement rapide des technologies génétiques et l’enrôlement de milliers de patients aboutissent au constat inverse : Les effets génétiques apparaissent de plus en plus faibles.

Comme le souligne Sonuga-Barke, l’un des leaders de la pédopsychiatrie anglaise : « Même les défenseurs les plus acharnés d’une vision génétique déterministe revoient leurs conceptions et acceptent un rôle central de l’environnement dans le développement des troubles mentaux ».

 

Au total, la génétique n’a identifié que quelques anomalies génétiques dont les altérations n’expliquent qu’un très petit pourcentage de cas et uniquement pour les troubles psychiatriques les plus sévères: autisme, schizophrénie, retard mental et trouble bipolaire de type 1 (c’est-à-dire avec épisode maniaque nécessitant une hospitalisation).

De fait, le pourcentage de cas expliqués par des anomalies génétiques est le plus élevé pour l’autisme et pourtant il  n’est que de 5 %.

En dehors de ces rares cas de lien causal, la génétique n’a identifié que des facteurs de risque qui sont toujours faibles. La portée de ces observations, tant du point de vue du diagnostic que de la recherche de nouveaux traitements, est donc limitée.

Certaines de ces études génétiques récentes ont été publiées dans des revues scientifiques très renommées. Les médias les ont donc présentées comme des découvertes de premier plan.

Il est alors remarquable de constater que ces fameuses études s’appuient souvent sur de plus anciennes montrant que le trouble psychiatrique en question est fortement héritable. Il est évident depuis longtemps que les troubles psychiatriques sont plus fréquents dans certaines familles. Les études comparant les vrais et les faux jumeaux permettent de mesurer l’héritabilité d’un trouble. Selon la plupart de ces études, l’héritabilité semble souvent assez forte en psychiatrie : de 35 % pour la dépression unipolaire, jusqu’à 70-90 % pour l’autisme et la schizophrénie. Pourtant, une héritabilité élevée n’implique pas nécessairement une cause génétique. En effet, les études d’héritabilité ne peuvent pas distinguer entre purs effets de gènes et interactions entre gènes et environnement.

C’est cela que reprennent des chercheurs en génétique : Elsabagh et Johnson.

Leur article relate le travail des chercheurs à l’endroit de ce que l’on appelle les risques génétiques d’autisme. Rien depuis 2006 n’a avancé y compris les études sur les jumeaux homozygotes dont les médias nous ont rabattu les oreilles.

Leur article s’accorde très bien avec celui de Francesca Happé. Elle essaye, elle, de savoir si des marqueurs de risque autistiques chez le bébé sont possibles que ce soit du côté de la génétique ou de la neuro-biologie. Ce qui est intéressant, c’est qu’elle cherche donc avant l’âge de deux ans ; d’autre part, elle pose la question : question en suspens de savoir si la méthode de laboratoire est plus pertinente et efficace que la simple observation des troubles. Elle pose également la question de l’intervention précoce eu égard à l’importance de l’environnement dans l’évolution des troubles. PREAUT serait tout à fait capable de répondre avec les outils que la psychanalyse met en évidence sur ces signes et de plus propose un traitement précoce, traitement psychique subjectif des troubles, tout aussi scientifiquement valables.

Amaral,  autre chercheur non moins important, démontre l’hétérogénéité des troubles autistiques et malgré ses espoirs de scientifique il pense que nous n’en sommes qu’aux prémisses des recherches .En 2010 il écrira cet article intitulé : « La promesse et les pièges de la recherche sur l’autisme ».

Cet article est un résumé des recherches actuelles en neurobiologie et l’oblige à un devoir de réserve quant aux avancées et à ce qui serait une réponse univoque aux questions suivantes auxquelles la science ne peut répondre, je les cite :

1)    Les causes de l’autisme

2)    Si l’on voit s ‘allumer des régions cérébrales comme impactées par la pathologie de l’autisme comment et pourquoi le sont-elles ? Ça,on en sait rien.

3)    Les composants de co-morbité sont-ils eux des indices étiologiques ou des effets secondaires d’un trouble central ?

4)     Pourquoi 4 fois plus de sujets masculins que féminins sont-ils concernés ?

5)    Y a t-il une similarité des signes, symptômes et éléments biologiques chez les sujets masculins et féminins.

6)       Qu’arrive t-il aux autistes au fur et à mesure de leur vieillissement ?

 

Les réponses à ces questions ne pourront émaner que d’une forme de recherche interdisciplinaire, collaborative.

Au point actuel des choses, il est probablement sage de rester ouvert d’esprit quant aux étiologies potentielles parmi lesquelles certaines pourraient se situer hors du champ de la pratique médicale courante. Et au vu de l’hétérogénéité incroyable de ce trouble, il est important de comprendre que tout ne peut entrer dans un même moule, c’est une façon raisonnable d’appréhender tout futur résultat.

C’est assez éloquent et me permet de terminer ce tour des recherches par l’article de Mikael Rutter sur le fait que certains enfants élevés dans des orphelinats de Roumanie et qui ont été victimes de privations profondes, montrent des schémas de type autistique.

Mais la significativité développementale et ses caractéristiques restent inconnues.
L’auteur parle de quasi autisme parce que l’écart avec l’autisme ordinaire n’est constaté que dans l’évolution des enfants à l’adolescence après des années d‘adoption par des familles anglaises. Cette évolution se traduit par la disparition de la plupart des troubles. L’auteur parle de désinhibition de l’attachement dont le point culminant se trouve être pour ces enfants à l’âge de 11ans.

 

C’est une vraie question que celle de la mise en route de cet attachement pour des enfants qui passent de l’orphelinat à une famille qui les adopte comme fils ou fille et les inscrivent dans leur filiation.