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S’interroger sur le rapport de la police à la rationalité politique requiert de définir conceptuellement l’institution policière. Appliquer à ce corps pro- téiforme de l’État moderne la question : « qu’est-ce que ? », ne va pas sans difficultés. Pour René Lévy, la police est l’anti-objet théorique par excellence, car elle est insaisissable tant sur la plan diachronique (le chercheur naïf qui comprendrait la « police » à partir de son histoire risquerait l’anachronisme), que sur le plan synchronique (la notion de « fonction de police » est elle- même faussement claire) (Lévy, 2001 : 279-345). Pourtant, loin de constituer un obstacle, la complexité de la police nous renseigne sur son essence. Que, comme le remarque Foucault, le terme de police soit aujourd’hui chargé d’un sens péjoratif, étroit et vague (Foucault, 1994 : 821), par opposition au sens « large et précis » des XVIIeet XVIIIesiècles, ne doit pas nous décou- rager. Outre que ces deux sens ont plus de rapport entre eux qu’il n’y paraît au premier abord, la nécessité, pour la souveraineté, de se doter d’un organe àtout faire, quelque peu encombrant parfois, et toujours labyrinthique et muable, témoigne que le souverain a conscience de la limite du pouvoir politique. Par l’intermédiaire de la police, le pouvoir rencontre en effet le réel social et historique. Si la police est assez flexible pour pallier un large ensemble de difficultés, d’ « inconvénients » — pour reprendre un terme du XVIIIesiècle1—, elle ne remplit pas une fonction seulement instrumentale, car elle participe, en toute conscience, des fins la politique....

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