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Tous ego

En démocratie les valeurs morales s'imposent aux citoyens de deux façons : pour être obéies et pour être violées, souvent par le même. Et il n'est pas rare que le viol d'hier puisse s'imposer comme la loi impérative de demain. Gardien des valeurs, le représentant de l'autorité peut ainsi être aimé pour son respect des lois ou bien, au contraire, son habileté à les utiliser  pour son seul profit.

Alcibiade versus Socrate.

Aujourd'hui le progrès de notre culture est cependant de légitimer toutes les déclinaisons, fussent-elles opposées, de la loi morale. En revanche il réprouve, avec une extrême rigueur, le fait de condamner cette diversité : chacun a désormais le droit de faire à son goût.

C'est là que surgit le problème car ce qui est goût s'impose de soi-même et exclut l'analyse aussi bien que la dialectisation.

La confrontation des choix moraux, inévitable malgré la tolérance, prend l'allure d'un choc des glaives sans que quelque référence tierce puisse conduire vers la paix.

Faute donc d'une réflexion éthique, on va demander à une loi civile – telle celle dite "citoyenneté et égalité" d'imposer une censure. Elle intéresse puisqu'aujourd'hui Charlie-Hebdo serait condamné pour intolérance.

Moralité (tiens, il en resterait une ?) : une censure légale, toujours dangereuse politiquement, est-elle préférable à une collective analyse éthique ?

T'es qui, toi ?

 La question ne se retrouve vraisemblablement dans la bouche des enfants de banlieue que parce qu'ils la reçoivent de l'incertitude même des enseignants touchant leur propre identité. En témoignent les remaniements des livres d'histoire rendus problématiques par le flottement de la position des auteurs. Ce flou n'est pas seulement idéologique ni politique mais moral, alimenté par le souci de savoir si un passé colonialiste autorise encore à parler en maître. Faute de trouver une maîtrise dans le pays hôte, il y aura du même coup des jeunes pour aller épouser sa cause ailleurs, puisqu'elle est nécessaire à la constitution de l'identité.

Faudrait-il conclure alors  à l'opportunité de muscler le pays d'accueil ?

Certainement, mais sans doute pas par une réponse en miroir.

Car une réponse à la passion, qui vient restreindre l'humanité à un groupe religieux ou national donné, ne peut être que politique, républicaine ; pour rappeler que le regroupement des hommes dépend non d'une fatalité d'appartenance mais de leur volonté de se reconnaître réciproquement dans l'effort d'une œuvre partagée.

Notes