On répète depuis Aristote que notre premier désir est de savoir.
Est-ce bien sûr ?
Une élémentaire histoire des sciences montre comment ont été punis ceux qui venaient déranger l'opinion commune avec un savoir neuf, perturbant le confort des certitudes et le statut des maîtres.
En outre, il y a les mœurs, malmenées car affranchies à cette occasion en tel ou tel domaine, par les progrès du savoir, notamment la biologie aujourd'hui.
Et le politique aussi, effarouché car ébloui et dévoilé, alors que pour exercer, il a régulièrement besoin d'une zone d'ombre.
En serions-nous, donc, toujours là ?
Sans grand doute. Car la levée de la zone obscure propre au fonctionnement social ébranle la sujétion ordinaire dont nous sommes les patients. Alors qu'il y a une classe intéressée à ce que ça dure.
Le “progrès” du savoir laisserait-il alors espérer avec la fin de l'obscurantisme la réalisation de cette vieille revendication : la liberté ?
Si on n'a jamais vu une once de sa réalisation, ce ne peut pourtant être un hasard.
Avançons qu'un véritable “progrès” en revanche devrait permettre de qualifier les sujétions qui sont inévitables, certes diverses selon leur formalisation, afin que, comme des enfants, nous cessions de réclamer en vain et nous réconciliions avec une autorité enfin légitimée.
Ch. Melman
7 sept. 2016