Nos sociétés, sécularisées ou non, se distinguent par leur évitement des recherches sur les conditions de formations de l’identité. Celle-ci repose pourtant sur un trait essentiel puisque, à la jonction de l’individuel et du collectif, il commande des conduites extrémistes.
Fonctionnant comme idéal, il pousse chacun à vouloir dépasser sa division pour s’accomplir, à l’image de cette instance, comme totalité. Cet accomplissement, passant par une mort subjective sinon réelle, est généralement honoré comme un sacrifice suprême quand il prend place dans une action collective.
C’est donc vraisemblablement le souci de préserver un moyen majeur du pouvoir politique qui incite à le laisser dans l’ombre. Les Grecs avaient parfaitement percé l’ambiguïté de cette obscurité. S’agit-il en effet de se sacrifier pour la tribu (Sparte) ou bien pour la démocratie (Athènes) qui, par définition, exclut l’intégrisme ?
Laissée en suspend, leur question, tel un fantôme, hante nos sociétés, à leur dépens.
Les nouveaux Départements créés dans l’École, l’une sur les apports de la théologie à l’étude des déterminations psychiques, l’autre sur les conditions de formation de l’identité, devraient nous permettre de renouer avec la spéculation antique, aidés par les apports (oubliés) de Freud et (incompris) de Lacan.
Charles Melman